DROITS DE SUCCESSION

Echapper au forfait mobilier

 

Le forfait mobilier est de plus en plus défavorable aux héritiers. L’inventaire fiscal établi par un commissaire-priseur est le moyen d’y échapper.

Christelle LAMY

Présidente Doma Enchères

La déclaration de succession à remettre à l’Administration fiscale doit comprendre une évaluation des meubles meublants. Il s’agit des meubles « destinés à l’usage et à l’ornement des appartements »[1]

Comment les estimer sans risquer une contestation de l’Administration fiscale ?

Le plus souvent, les héritiers optent pour le « forfait mobilier » : ils déclarent un montant forfaitaire égal à 5% de l’ensemble des autres valeurs mobilières et immobilières de la succession.

Cet outil simplificateur doit être manié avec précaution, d’une part, et présente des inconvénients majeurs, d’autre part. L’inventaire fiscal dressé par un commissaire-priseur est un moyen sûr d’y échapper.

Pièges à éviter

Le forfait mobilier doit être manié avec précaution.

Une première difficulté tient à la définition même des meubles meublants. En effet, l’article 534 du code civil exclut les « collections de tableaux qui peuvent être dans les galeries ou pièces particulières ». Ainsi selon l’usage et le lieu, le forfait trouvera à s’appliquer ou non. A noter que la valeur des tableaux est indifférente[2].

Une seconde subtilité est introduite par l’article 764 II du Code général des impôts : concernant les bijoux, pierreries, objets d’art ou de collection, s’il existe un contrat d’assurance en cours au jour du décès et conclu moins de dix ans avant l’ouverture de la succession, la valeur imposable de ces biens ne peut être inférieure aux valeurs mentionnées dans ledit contrat. Dans cette hypothèse, les bijoux, pierreries, objets d’art ou de collection ne peuvent donc être compris dans le forfait mobilier de 5%[3].

Ces subtilités rendent nécessaires les conseils d’un notaire ou d’un avocat spécialisé.

Les inconvénients majeurs du forfait mobilier

Le forfait mobilier présente des inconvénients qui tendent à se renforcer.

D’une part, la valeur de nombreux actifs immobiliers augmente, renchérissant d’autant l’assiette du forfait[4].

D’autre part, la valeur de certains meubles meublants traditionnels diminue.

Cet effet ciseau rend la valeur des meubles meublants relativement faible par rapport à celle des autres biens de la succession.

Souvent, les héritiers n’ont donc pas intérêt à choisir le forfait mobilier de 5%.

L’inventaire fiscal par un commissaire-priseur pour échapper au forfait mobilier

Pour échapper au forfait mobilier, une solution s’impose : faire établir un inventaire dit « fiscal ». Celui-ci établit la liste détaillée des meubles meublants de la succession et attribue à chacun une valeur. Il doit être établi par un commissaire-priseur, un notaire ou un huissier de justice.

En pratique, le notaire ouvre la succession et sollicite le commissaire-priseur, dont le cœur de métier est précisément l’évaluation des meubles meublants.

Il peut s’agir d’un commissaire-priseur judiciaire ou d’un commissaire-priseur de ventes volontaires, en qualité alors de sapiteur et sous la responsabilité du notaire[5].

Une conclusion s’impose : le forfait mobilier est de plus en plus défavorable aux héritiers. L’inventaire fiscal établi par un commissaire-priseur est le moyen d’y échapper.

[1] Article 534 du code civil.

[2] Com. 17 octobre 1995, n°94-10.196, à propos d’une toile de Poliakoff acquise par le défunt deux mois avant son décès pour 385 000 francs et qualifié de « meuble meublant » par la Cour de cassation.

[3] Com. 4 octobre 1994, affaire dans laquelle l’Administration fiscale avait exclu les œuvres d’art assurées du forfait mobilier de 5% et réintégré leurs valeurs dans l’assiette du forfait, approuvée par le Cour de cassation.

[4] Voir notamment l’évolution de l’indice des prix des logements neufs et anciens en France métropolitaine publié par l’INSEE :  https://www.insee.fr/fr/statistiques/6009333 (consulté le 2 février 2022).

[5] Conseil des Ventes Volontaires de meubles aux enchères publique, « Le commissaire-priseur de ventes volontaires et les inventaires successoraux »: https://www.conseildesventes.fr/sites/default/files/inventaires_sucessoraux.pdf (consulté le 2 février 2022)